VITICULTURE

Viticulture et changement climatique : la conférence nationale Vitilience trace les pistes de l’avenir

Publié le 14 avril 2025

Emmanuelle Fourteau

© IFV

Le 20 mars 2025, la conférence nationale Vitilience a rassemblé chercheurs, professionnels et acteurs de la filière viticole autour d’un enjeu majeur : l’adaptation au changement climatique.

Vitilience est une déclinaison du projet Laccave, dont l’objectif est d’offrir à la filière viticole des solutions concrètes pour atténuer et s’adapter au changement climatique. Ce projet mobilise vignerons, organismes de défense et de gestion (ODG), chercheurs et professionnels. L’enjeu est d’expérimenter des innovations et de les évaluer selon un cahier des charges rigoureux. L’Institut National de l’Origine et de la Qualité (Inao) joue un rôle crucial en assouplissant certaines règles, notamment en matière d’irrigation et de couverture des sols.

Mélissa Merdy, ingénieure à l’IFV et chargée du pilotage national de Vitilience, a détaillé les outils opérationnels mis en place : inventaire des leviers, démonstrateurs régionaux, animation d’un réseau d’acteurs et coordination du projet. La phase actuelle est centrée sur la production, la diffusion des innovations et la mise en place de synergies entre les différents acteurs. Une thèse en cours vise à identifier les innovations prometteuses.

Thierry Caquet, vice-président en charge de la politique internationale à l’Inrae, a souligné la nécessité d’une approche systémique et de la mobilisation de multiples leviers d’adaptation. Selon lui, l’adaptation incrémentale ne suffit plus, et il est essentiel de repenser l’ensemble de la chaîne de valeur, des producteurs aux consommateurs. La viticulture, pionnière dans ce domaine, doit conjuguer adaptation et atténuation des effets du changement climatique.

Nathalie Ollat, directrice de l’UMR Ecophysiologie et génomique fonctionnelle de la vigne à Bordeaux Inrae, a rappelé l’héritage du programme Laccave et l’importance d’une approche locale. Chaque vignoble doit identifier ses propres leviers d’adaptation, en s’appuyant sur la recherche et la collaboration interrégionale.

Quatre démonstrateurs, Resiloire, Demoniacc, Vitopia 2051 et Viticors’Alti, ont déjà commencé à tester des solutions innovantes. Ces initiatives s’articulent autour de deux stratégies : stratégie de transition, qui consiste à adapter les plantations existantes, et stratégie de rupture, qui repose sur l’implantation de nouvelles variétés et pratiques culturales innovantes. La traque à l’innovation concerne aussi bien les vignes que les procédés de vinification, avec une attention particulière à la sobriété énergétique.

Carole Ly, directrice générale de l’Inao, a mis en avant le rôle clé de l’Institut dans l’adaptation de la viticulture. L’Inao accompagne les changements en assouplissant les règles de production et en adaptant les cahiers des charges aux réalités climatiques. Par exemple, la moitié des vignobles testent actuellement de nouveaux cépages sur une décennie pour en évaluer l’impact sur la qualité des vins.

Audrey Dubois, chargée de mission Vitilience à l’IFV, a expliqué comment l’animation régionale se structure autour de la création de démonstrateurs et d’ateliers collaboratifs. Douze animateurs régionaux et dix ateliers de construction sont déjà en place pour accompagner le projet.

En conclusion, Eric Paul, président du Comité vin IGP Inao, a rappelé que les résultats de ces expérimentations pourront alimenter les futures pratiques viticoles et renforcer la résilience du secteur. Philippe Brisebarre, président du Conseil permanent de l’Inao et vigneron à Vouvray, a quant à lui souligné la nécessité d’agir rapidement face à l’intensification des aléas climatiques.

Ce que nous savons avec certitude, c’est que la viticulture de 2050 sera radicalement différente de celle d’aujourd’hui. Le défi consiste à développer des stratégies compatibles avec la production, la biodiversité et les ressources naturelles. Une approche systémique, ancrée dans les territoires et mobilisant l’ensemble des acteurs, s’impose comme la voie à suivre pour assurer l’avenir du secteur viticole face aux mutations climatiques.