Attention aux refermentations et aux risques pathogènes pour les consommateurs, dans les boissons peu alcoolisées. Ils nécessitent de nouveaux contrôles, une hygiène et un conditionnement adaptés.
« Actuellement 38 % des échantillons de vins désalcoolisés reçus au laboratoire Excell repartent en fermentation dans les cinq jours qui suivent leur réception ! », prévient Christophe Rossi du groupe Laffort. Quand l’alcool est extrait, les levures dansent ! « A moins de 0,5 % d’alcool, les déviations sont très rapides. » « L’alcool est un stabilisant microbiologique. A 15 % il a un effet létal, à 10 % une inhibition, à 5 % une inhibition modérée et à 0,5, on ne note plus qu’une faible inhibition », confirme Antoine Fleury de Sofralab. Un vin désalcoolisé est extrêmement fragile.
Et, plus grave, les risques ne se limitent pas seulement à la dégradation du produit mais également au développement de germes pathogènes pour le consommateur. L’hygiène doit donc être irréprochable, les contrôles microbiologiques sont à multiplier et doivent se baser sur les normes en vigueur dans le contrôle alimentaire en général, c’est-à-dire avec détection des entérobactéries, des entérocoques fécaux, des coliformes totaux, en plus des contrôles microbiologiques classiques (levures, moisissures, bactéries). Plusieurs laboratoires œnologiques ont mis en place ces nouveaux contrôles pour la filière.
Les vins désalcoolisés sont également plus sensibles aux contaminations externes. Un regard très attentif est requis, avec vérification de la contamination du matériel (inspections des points morts, contrôles par écouvillonnage, maitrise des températures…), pour éviter les recontaminations. Autre conseil : être vigilant vis-à-vis de la qualité microbiologique des intrants et matières sèches : mouts concentrés ajoutés, liège. On peut aussi jouer sur le pH du vin, plus il sera acide, moins on aura de risques de contamination.
La qualité de filtration des vins est bien sûr déterminante pour maitriser la qualité microbiologique, avant et après désalcoolisation. Pour Antoine Fleury, le plus important est la stabilité à l’embouteillage. On conseille souvent une préfiltration (1,2µm), suivie d’une filtration stérile à 0,65 voire 0,45µm. Plusieurs traitements sont ensuite possibles : la pasteurisation thermique (flashpasteurisation ou tunnel) ou le traitement chimique au conservateur DMDC (diméthyl dicarbonate).
Antoine Fleury a rappelé les conditions d’emploi du DMDC. Le traitement se place juste avant le conditionnement en bouteilles, après la filtration finale. Difficilement miscible, il est ajouté via un appareil particulier pour une injection précise et régulière et pasteurise ensuite le milieu pendant une dizaine de minutes avant de s’hydrolyser en CO2 et méthanol. Pour son fournisseur, le DMDC présenterait plusieurs intérêts : il consomme moins d’énergie et d’eau que la pasteurisation, convient au vin en canettes (qui ne passent pas en tunnel de pasteurisation), agit jusqu’à la pose du bouchon (contrairement à la thermoflash) et conserverait davantage le fruité et la fraicheur.
Le SO2 et le sorbate sont autorisés mais ne sont pas toujours suffisants pour assurer une bonne stabilité microbiologique.
Au-delà de son intérêt microbiologique, l’alcool est aussi un solvant du vin qui solubilise de nombreux composés. Le fait de l’enlever peut augmenter les risques d’instabilités physiques, cristallines et colloïdales (tartriques et protéiques).
La durée de vie des désalcoolisés est estimée par des tests de vieillissement pour l’aspect organoleptique et par des tests de stabilité microbiologique. Ces produits n’ont pas vocation à vieillir, ils sont consommés rapidement. Les bières sans alcool affichent souvent 18 mois et les vins 3 à 5 ans le plus souvent.
Attention aussi aux colmatages en filtration
Attention aux colmatage des désalcoolisés, prévient Arnaud Bonnetain de la société Pemflow, car les gommes arabiques et les mannoprotéines, souvent ajoutées aux désalcoolisés, sont très colmatantes. Elles peuvent être retenues sur les cartouches de filtration avec non seulement des problèmes de colmatage à la clé mais aussi un appauvrissement du désalcoolisé et donc un rendu organoleptique différent. Des sociétés réalisent des Vmax pour la filtration des nolow pour raisonner la qualité et le coût et la filtration.
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